L’agence de voyage est-elle tenue de rembourser le voyage de ses clients, si un ouragan frappe le lieu de vacances?

Par Monty Sylvestre

Dans une décision rendue en avril dernier, la Division des petites créances de la Cour du Québec doit répondre à cette question en tenant compte des circonstances entourant l’ouragan Sandy qui a frappé Holguin, à Cuba, en octobre 2012.

Les clientes ont acheté un forfait tout inclus au coût d’environ 1 000 $ par personne le 18 octobre 2012. Le voyage d’une semaine est prévu pour débuter au départ de l’aéroport de Montréal le 23 octobre 2012. Elles ne savent rien d’un possible ouragan qui pourrait sévir dans ce secteur, ni au moment d’acheter le voyage, ni au moment d’embarquer dans l’avion. Le lendemain matin 24 octobre, elles apprennent, grâce au personnel de l’hôtel cubain, la possibilité que l’ouragan Sandy frappe Holguin dans la nuit qui vient. On leur conseiller de rester dans leur chambre à partir de 20 h, jusqu’à nouvel avis.

L’ouragan frappe Holguin. L’eau courante et l’électricité sont coupées pendant 3 jours. Il n’y a pratiquement pas de services ni activités sur le site pour cette raison. La situation se rétablit graduellement par la suite.

Les clients réclament le remboursement du voyage et 1 000 $ chacune pour les inconvénients subis, en plus du remboursement de quelques frais, contre l’agence de voyage et le grossiste Vacances Sunwing. Ces dernières invoquent la « force majeure », une exception prévue par la loi pour se dégager de ses obligations, lorsque l’on est tenu de fournir un résultat précis convenu à l’avance, mais qu’un événement « imprévisible et irrésistible » survient et empêche cela.

La preuve soumise devant la Cour révèle que la veille du départ des clientes, soit le 22 octobre 2012, jusqu’à 23 h, le National Hurricane Center de Miami émettait des avis à l’effet que l’ouragan Sandy frapperait la Jamaïque et Haïti. Rien ne concerne Holguin, sauf pour une possibilité de petites perturbations reliées à cela.

C’est le jour du départ en avion, vers 14 h, que le National Hurricane Center constate un changement dans la trajectoire de l’ouragan Sandy et émet l’avis qu’il se dirige maintenant sur Holguin, entre autres, avec conditions météorologiques d’ouragan pour les 36 heures à venir. Le National Hurricane Center a raison.

Or, le vol de départ des clientes, à partir de Montréal, a décollé à 6 h 40 du matin. L’avis de changement de trajectoire vers Holguin est émis à 14 h, alors que les clients sont déjà rendus à leur hôtel cubain. La Cour juge donc qu’il était « imprévisible et irrésistible » pour l’agence de voyages et le grossiste Sunwing de prévoir des mesures pour accommoder les voyageurs et leur offrir des alternatives, avant qu’ils quittent Montréal.

En résumé, si les experts du National Hurricane Center ne pouvaient pas prévoir le changement de trajectoire plus tôt, il aurait été difficile pour des agents de voyage de le faire. La situation était donc imprévisible au moment du départ en avion, de sorte que la responsabilité de l’agence de voyages et du grossiste Sunwing n’est pas engagée. Le recours des clientes est rejeté.

Lire la décision : http://www.canlii.org/fr/qc/qccq/doc/2016/2016qccq2447/2016qccq2447.pdf