Votre employeur peut-il contrôler votre apparence physique?
Vous vous trouvez un nouvel emploi idéal et votre employeur indique, dans le manuel de l’employé, que les tatouages et perçages sont interdits. Ce dernier a-t-il le droit d’imposer ceci?
En effet, les tatouages et les perçages semblent devenir de plus en plus courants dans notre société. Autrefois marginale, cette tendance semble maintenant gagner en popularité dans tous les milieux sociaux, incluant les milieux professionnels. Or, face à ce phénomène, de nombreux milieux professionnels imposent à leurs employés des restrictions. Mais est-ce légal?
L’employeur peut établir certaines exigences quant à l’apparence personnelle de ses salariés, notamment à propos de l’exhibition de tatouages et de perçages ou encore en imposant un code vestimentaire strict.
Cependant, pour imposer de telles restrictions, l’employeur doit justifier celles-ci en vertu de l’article 9.1 de la Charte des droits et libertés de la personne, en appuyant sa décision sur des critères objectifs, par exemple la sécurité au travail, l’hygiène corporelle ou encore, l’image de l’entreprise et la relation avec les clients.
En effet, puisque ces restrictions peuvent porter atteinte aux libertés fondamentales protégées par la Charte, notamment le droit à la liberté d’expression (art. 3 de la Charte), le droit à la sauvegarde de la dignité (art. 4 de la Charte) et le droit au respect de la vie privée (art. 5 de la Charte), il appartient à l’employeur de justifier que les mesures prises par ce dernier sont justifiées.
Ainsi, un récent jugement de la Cour du Québec[1] rappelle que dans le cas d’un tatouage apparent, l’employeur ne peut imposer des limites sur la dimension et l’emplacement du tatouage, ou encore, sur la nécessité d’obtenir l’autorisation de la direction avant de se faire tatouer. Par contre, l’obligation de couvrir les tatouages non autorisés ou d’imposer le port de manches longues constitue toutefois une atteinte minimale et raisonnable. L’employeur peut également interdire des tatouages incitant notamment à la violence ou énonçant un message injurieux ou haineux.
Vous pouvez donc laisser libre cours à votre imagination et vous faire tatouer si le cœur vous en dit, mais rappelez-vous que l’employeur peut avoir son mot à dire si votre liberté de porter le tatouage vient en opposition avec une politique de l’entreprise… Car les droits des uns se terminent où commencent les droits des autres…
[1] Fraternité des policiers et policières de Saint-Jean-sur-Richelieu c. Saint-Jean-sur-Richelieu (Ville), 2016 CanLII 64000 (QC SAT).