Deux poids, deux mesures
Le gouvernement du Québec a annoncé que le CAVAC de l’Estrie recevra son aide financière d’une hauteur de 1,4 M$ dans le but de financer ses activités pour l’année 2018-2019. Le Centre d’Aide aux Victimes d’Actes criminels offre les services d’une équipe de professionnels formés en service social, en psychologie, en gérontologie ou en toxicomanie.
Le CAVAC s’avère d’une grande aide pour les victimes d’actes criminels. Effectivement, le régime d’indemnisation pour les victimes d’actes criminels, l’IVAC, n’est pas parfait : la réparation monétaire n’est pas instantanée et la somme accordée n’est pas astronomique. Un petit coup de main supplémentaire est donc le bienvenu.
Mis à part l’aide accordée par le gouvernement, les victimes d’actes criminels possèdent-ils un recours pour assurer la réparation du préjudice qui leur a été causé? Bien sûr! Les tribunaux de droit civil peuvent accorder un montant pour dédommager la victime qui réussit à démontrer les trois éléments suivants : la faute, le dommage et le lien de causalité entre les deux. En effet, une infraction criminelle peut à la fois être jugée par la chambre criminelle que constituer une faute en droit civil.
En fait, en chambre criminelle, la partie demanderesse est l’État. Elle poursuit l’accusé, au nom de la société, afin que son geste soit puni. Bien que ces poursuites résultent la plupart du temps d’une plainte de la victime au Directeur des Poursuites criminelles et pénales, la victime n’est pas partie au litige. Elle ne reçoit aucune compensation : le juge tranche strictement sur la question de la culpabilité de l’accusé et, le cas échéant, de la peine à purger par ce dernier.
Peu importe la décision du juge en chambre criminelle, la victime peut, de son côté, poursuivre au civil l’accusé. Cela dit, le juge de la chambre civile ne sera pas tenu par le jugement au criminel. Effectivement, deux critères bien différents sont utilisés pour trancher. Au criminel, il faut être certain hors de tout doute raisonnable que l’accusé est coupable pour le déclarer ainsi. De plus, le procureur de la couronne doit prouver à la fois le geste répréhensible (actus reus) que l’intention coupable (mens rea). Au civil, le juge doit plutôt déterminer, sur la base de la balance des probabilités, si la version de la victime est plus plausible que celle du défendeur pour exiger compensation. Le critère de l’intention malicieuse (la mauvaise foi) sera utilisé par le juge pour discréditer une version plutôt qu’un autre : il ne s’agit pas d’une condition sine qua non pour déterminer qu’il y a une faute.
Ceci étant dit, même si la victime d’un acte criminel reçoit de la Cour un jugement en sa faveur, cela ne veut pas dire qu’il sera effectivement indemnisé : le défendeur en pareille situation est trop souvent insolvable.
Voilà qui réitère l’importance des régimes publics d’indemnisation qui se portent en aide aux victimes, et ce, peu importe la forme de celle-ci.